Bullshit Ent

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dimanche 23 février 2014

La Belle et la Bête - Christophe Gans

Je partage le cinéma français en plusieurs catégories : les films d'auteurs bons (il y en a plein), les films d'auteurs pas bons/pédants (il y en a plein aussi), les comédies efficaces (il y en a presque aussi), et les comédies pas drôles (il y en a trop). Et au milieu de tout ça il y a des réalisateurs comme Luc Besson ou Christophe Gans, qui bousculent la planète "cinéma français" avec des films très bons (Le Pacte des Loups) et des films moins bons (Silent Hill), des films d'actions ou des thrillers, bref du neuf.
Et cette année, Christophe Gans revient sur le devant de la scène après huit années d'absence grâce à son nouveau film : La Belle et la Bête. 

MISE AU POINT HABITUELLE

Si vous êtes en première, vous connaissez probablement La Belle et la Bête, le conte de Mme Leprince de Beaumont, écrit en 1757. Ce conte a donné naissance à neuf adaptations cinématographiques dont deux resteront dans les mémoires : celle de Cocteau  (1946), et celle des studios Disneys (1991).
En 2014, arrive donc la version de Christophe Gans, avec Léa Seydoux et Vincent Cassel en tête d'affiche.
Christophe Gans donc est un de mes réalisateurs préférés du cinéma français, principalement pour son talent certain et pour sa volonté de faire des films différents. On se souvient de films comme Le Pacte des Loups qui avait bien marché au box-office et lui avaient assuré une notoriété méritée.
La Belle et la Bête c'est ainsi son nouveau challenge, puisqu'il s'agissait de refaire vivre le conte d'antan à coup d'effets numériques et d'acteurs connus.
Le challenge est-il réussit ? Suspens.

ON S'EN FOUT DU SUSPENS, RACONTE

Le problème de ce film, c'est le film.
J'exagère volontairement bien entendu. Mettons nous d'accord : j'avais de très mauvais à priori sur ce film (vraiment très noirs), mais j'ai tout de même été surpris. Pas au point de me faire dire que j'ai aimé le film, mais tout de même je dois lui reconnaitre des qualités.

Mais les qualités c'est pour plus tard, on va s'occuper des défauts pour l'instant.
Le premier réside dans l'élément principal du conte : la romance entre la Belle et la Bête. C'est une romance vide, qui sort presque de nulle part. Il y a trois "grandes scènes" entre les deux protagonistes, dont deux de disputes et de cris, et une de réconciliations touchantes. Et pourtant la Belle semble folle amoureuse tout de suite après, au point de vouloir rester avec la Bête.
Alors oui, Belle (puisque c'est son nom) a appris à connaitre le monstre grâce à des espèces de flashbacks du temps où c'était encore un humain, mais lui ne sait absolument rien d'elle. Ils n'ont rien partagé, du coup l'histoire d'amour ne tient pas la route, elle déstabilise presque tant elle arrive de manière inattendue. Or, la romance est le tronc narratif du conte d'origine, un élément qu'on ne peut se permettre de bâcler. Et ça m'étonnerais que Christophe Gans ne l'ai pas considérée, donc en admettant que c'est un choix de réalisation/de narration, je le trouve assez mal justifié.

L'autre défaut de ce film réside dans ses acteurs.
Écartons tout de suite Vincent Cassel, qui joue très bien, camarade par excellence de Christophe Gans, leur travail est toujours de qualité. Que ce soit en bête féroce, où en prince hautain, Cassel sait être convaincant et porte le film du début à la fin.
J'ai vraiment énormément de mal avec Léa Seydoux (euphémisme). Pas juste dans ce film, de manière générale. Je la trouve assez fade dans son jeu, et elle n'apporte quasiment jamais d'éléments "en plus" aux films dans lesquels elle joue. Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit : Léa Seydoux joue comme il faut, mais ça s'arrête là. On a donc une Belle, normale, ni trop parfaite, ni trop enjouée, un peu ennuyeuse. Je reconnais que les passages où la jeune fille est hautaine, voire impertinente, sont convaincants (ce sont bien les seuls positifs que je retiens pour Léa Seydoux), mais les autres sont justes normaux ou fatigants. Vraiment, Léa Seydoux ne fait pas une bonne "princesse". On a aucune empathie pour son personnage, on ne partage pas sa peur, on la regarde juste progresser dans le château et pleurer de temps en temps.

Mais Léa Seydoux n'est pas le pire que ce film a gardé en réserve au niveau des acteurs.
Je passe sur Dussollier qui ne m'a pas gêné en vieux père fatigué, bref.
Les rôles secondaires sont vraiment mal joués. Et c'est la première fois que je dis ça d'un film.
Je fais parti de ces gens qui considèrent qu'un acteur ne peut pas mal jouer, dans la mesure où c'est son travail. Mais là j'ai été concrètement dérangé par les rôles secondaires. Les trois frères surjouent (Deburger, Gob, Meliava - merci Allociné), ça devient vite désagréable. Et les deux soeurs (dont Audrey Lamy) ne sont que des comics-reliefs non justifiées et surtout, pas amusantes du tout.
Conséquence : on en a vraiment rien à cirer des personnages, tout simplement parce qu'ils sont énervants.
J'imagine que ces gens sortent tout de même d'écoles de cinéma, donc le problème doit venir d'ailleurs mais pour le coup, c'est bien au delà de mes capacités.
Le "badguy" du film s'en tire plus ou moins bien pour sa part (Eduardo Noriega), il reste un des personnages captivants du film, sans plus.

Bon attaquons le troisième problème : l'univers.
Je n'ai pas du tout compris où Christophe Gans est parti avec cet univers. D'abord : les petits chiens tout mignons dont j'ai oublié le nom. Bon ils servent à quoi ? À rendre le château moins vide admettons. Mais ils font quand même tâche au milieu du film. Ils sont censés faire rire ? Je ne crois pas. Le film stipule qu'ils deviennent les meilleurs amis de Belle : il n'y a aucune vraie interactions entre eux. Bon, en plus ils ont quand même une tête vraiment "cartoon", personnellement j'ai pas accroché.
Et maintenant les géants. Les géants de pierre. Le système de sécurité du château, c'est des statues de pierre géantes. Là non plus je vois pas vraiment ce que ça vient faire ici. Bon ça passe bien mieux que les petits chiens, mais c'était purement une invention de Christophe Gans. Donc, oui ça remplit des scènes, mais là aussi on a l'impression que c'est à côté de l'ensemble.
Enfin : les divinités.
Je cite : "la nymphe des bois", et "le Dieu de la Forêt". Ce serait passé dans un univers antique, grec ou romain, ce sont des références mythologiques valables. Elle sont là pour justifier l'apparence monstrueuse de la Bête, mais franchement j'ai trouvé ça un peu ridicule. Vraiment les deux personnages sortent du chapeau magique des scénaristes. Cependant, c'est plus un détail qu'un élément scénaristique pur : on est perdu sur le coup, mais on oublie vite et on avance de nouveau.

Dernier élément vraiment décevant pour le coup : la musique. Présente mais juste suffisante. Bon, je ne suis pas du tout qualifié pour traiter des musiques de films, donc je me contenterais de souligner que la musique du générique de fin est vraiment ridicule elle aussi. Voilà, on s'arrête là.

OKAY MERCI À PLUS

Attend, c'est pas finit.
J'ai dit au début que j'avais été surpris, c'est vrai.

Christophe Gans a vraiment des talents inouïs pour la réalisation. Le film, malgré tout ces défauts, passe très bien, la séance est même agréable. J'ai pas du tout senti les deux heures passer, alors que la semaine dernière dans American Bluff j'avais l'impression que ça durait le double.
Une caméra agile, des mouvements vraiment inattendus (je pense notamment au plan panoramique qui devient une contre plongée juste suivant une ligne). La découverte du château se fait avec les yeux et ce dernier semble toujours plus grands (chaque plan le rend encore plus colossal). Bref, Christophe c'est du lourd. Même les scènes d'actions sont bien ficelées, forcément c'est sa spécialité. Le combat des géants restant une séquence mémorable.
Et en plus il connait ses classiques : les plans du repas font évidemment référence à ceux de la version de Cocteau, la Bête debout derrière la Belle, terrifiée. Il m'a même semblé que les habits du monstre faisaient écho à ceux de la version Cocteau. D'ailleurs je suis forcé de dire un mot sur les robes de la Belle qui enchanteront le public féminin, et qui satisferont le public masculin.

Ensuite, les dialogues. Vraiment profondément convaincants. La Bête fait preuve d'une éloquence très raffinée, là où ceux de la Belle sont mine de rien très touchants. Si le jeu des second couteaux n'est pas convaincant, les lignes de texte rattrapent le tout.

Et je terminerais par les effets spéciaux.
À la sortie de la première bande-annonce, j'ai tiré sur l'ambulance en déclarant qu'il y en avait trop et que ça me faisait presque vomir. Mais je reconnais que j'ai parlé trop vite puisque la post-production a fait un boulot monstre et que tout ce qui me gênait dans la bande-annonce a été enlevé sur le produit final. Le château et sa vallée sont très beaux, les géants de pierre et les chienchiens ont une texture réaliste, au final ça passe très bien.

OKAY MERCI À PLUS

Voilà, la conclusion exactement.
Donc au final, je ne peux pas dire que La Belle et la Bête est un bon film. C'est un mauvais film bien fait disons. Le manque de saveur de l'histoire d'amour, le jeu des acteurs décevant, les musiques oubliées, et l'univers bancal viendront vite à bout des impatients.
Même si Christophe Gans rattrape l'ensemble grâce à ses aptitudes, je ne comprends toujours pas ce qu'il est allé faire dans un conte de fée, lui qui est pourtant si porté sur l'action et les thrillers.
Le choix de Léa Seydoux me laisse perplexe également, mais quand on voit que le générique commence par le nom des producteurs, parmi lesquels Jérôme Seydoux, on fait rapidement le lien. Christophe est habitué à se faire imposer des actrices (regardez Silent Hill par curiosité), on attend de voir ces commentaires personnels une fois la version matérielle du film disponible.

Au final, je vous conseille plutôt de regarder La Belle et la Bête de Cocteau qui reste une référence de la Nouvelle Vague, ou celle des studios Disney si vous êtes nostalgique de l'époque où vous chantiez sur le canapé.
Si vous avez envie de voir un peu plus de Christophe Gans je vous conseille donc Le Pacte des Loups qui lui a fait ses lettres de noblesse, et aussi Silent Hill qui figure dans son livre de plomb.
Enfin, si vous aimez Léa Seydoux (on ne rit pas, il y en a), La vie d'Adèle reste le film de sa carrière, même si la seule fois où elle m'a plus c'est dans Les adieux à la Reine.

Voilà, bonne soirée et bonne séance les loulous.

LE MOT DE LA FIN

Cette semaine le mot de la fin revient à Maxou qui nous déclare du fond de son coeur : "J'ai rien à dire sur ce film de merde".
Merci Maxou, on s'en souviendra.

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