Bullshit Ent

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lundi 19 janvier 2015

Captives - Atom Egoyan

Bonsoir la populace, et désolé car j'écris avec un jour de retard, honte sur moi.
Bref, les excuses finies on va passer à la suite.

Hier j'ai donc été voir Captives film canadien dans le but de changer avec 2014, qui fut l'année des blockbusters.

MISE AU POINT

Inutile de vous parler longuement d'Atom Egoyan, le réalisateur du film, il n'est que peu connu du grand public français aussi ses oeuvres n'ont pas dû parvenir jusqu'à vous (et jusqu'à moi non plus d'ailleurs).
En revanche il est judicieux de signaler que Captives ("The Captive" en VO) a fait un petit détour par le très estimé et fort respecté Festival de Cannes, puisqu'il avait été selectionné pour la Palme d'Or (qu'il n'a hélas pas remporté).
On a donc à faire à un genre d'ovni lointain venu de la blanche et douce contrée du Canada, nominé sur La Croisette, et qui raconte d'ailleurs une histoire plutôt sombre et glauque.

DÉVELOPPEMENT

J'espère que vous admirez le tact et le doigté avec lequel j'ai orchestré la transition depuis l'introduction jusqu'au développement.
Une histoire sombre et glauque, oui, mais qui constitue la première qualité de ce film très très réussi : une petite fille se fait kidnapper et l'enquête sur sa disparition se poursuit sur huit ans. Entrent alors en relation les parents, les policiers, et surtout les ravisseurs, pour une enquête longue et prenante.

Un scénario avec du potentiel qui touche au douloureux thème de la pédophilie et des enquêtes policières qui y sont directement liée. Ce qui n'est pas sans rappeler le puissant Polisse de Maïwenn à l'échelle nationale.
Mais restons sur Captives qui peut donc se vanter d'un scénario extrêmement bien ficelé et tout autant passionnant et haletant alors que le rythme lent et calme ne semblait pas se prêter à une telle prouesse. De plus le film est basé sur un montage à temporalité brisée : c'est à dire que les séquences n'apparaissent pas dans l'ordre chronologique et que le spectateur doit se joindre à l'enquête en reconstituant la trame du film progressivement.
Pour épauler ce choix de montage particulier et ce scénario remarquable, on constate une réalisation de haut niveau. En effet, le film semble enveloppé dans une certaine retenue sonore et visuelle alors qu'il traite un sujet extrêmement violent. Aucune image n'est montrée et les propos chocs se comptent à peine sur les doigts d'une main. Et ce n'est pas plus mal : très rapidement le spectateur doit faire appel à son imagination pour appréhender la dureté et la réalité de l'histoire, dans un film où tout n'est que suggéré. Un choix de réalisation qui renforce indéniablement la force et la puissance du scénario qui, hélas, n'est pas sans rappeler les plus sordides faits divers.
On applaudit également les choix esthétiques : la neige blanche et pure, qui n'est pas sans faire écho à l'innocence de l'enfance et toujours à ce même sujet douloureux. Mais également les décors intérieurs souvent aliénant, étroits, exigüs, étouffant, qui pèsent sur le spectateur et les personnages et qui rajoutent de la tension. Un mot aussi sur le découpage de certains plans : notamment les scènes où l'antagoniste principal est assis sur son bureau et qu'il se reflète dans son miroir latéral, donnant l'impression qu'il se parle à lui même, et rappelant la dichotomie du personnage.

On pourrait parler des choix de réalisations et esthétiques du film mais ça durerait un peu trop longtemps et il faut en garder pour le formidable travail des acteurs. Notamment deux d'entre eux : Ryan Reynolds qui interprète à merveille le rôle du père meurtri, désespérément seul, et prêt à tout pour retrouver sa fille, même après huit ans ; et Kevin Durand dans le rôle du pédophile (?) fou à lier, psychopathe dualiste, qui prend plaisir à tourmenter la famille de Cass (la petite fille) huit ans après l'enlèvement, alors qu'il retient toujours la fille en otage.
Outre ces deux messieurs, tout le monde s'en sort très bien également, j'ai pas grand chose à redire là dessus, si ce n'est que le rôle de la mère dévastée qui fond en larmes à chaque scènes m'énerve toujours autant, mais rien à voir avec l'actrice en particulier.

Atom Egoyan a donc livré un magnifique film extrêmement bien réalisé, à mi chemin entre le film policier, le thriller, et le film minimaliste et intimiste d'auteur (à tri chemin donc ?). Et j'aimerais pouvoir vous parler toujours plus de l'aspect visuel du film, de l'histoire haletante, et de la façon de traiter cet ensemble mais j'ai un contrôle de Spé-SciencePo et un autre de Latin demain (#nobodycares).

CONCLUSION

Du haut niveau avec Captives, l'année commence très bien. Et si le scénario, la réalisation, et le jeu d'acteur n'auront pas séduit le prestigieux jury du Festival de Cannes, il a su convaincre celui de Bullshit Ent qui vous le recommande chaudement, même s'il est froid (merci merci).
Bon par contre il doit être en fin de diffusion et en plus il doit pas être dans toute les salles, donc bonne chance ! Mais allez quand même le voir.
Bonne soirée, et bonne séance.

LE MOT DE LA FIN

Cette semaine le mot de la fin revient à la très respectable Maman qui nous dit que "un très bon thriller angoissant et haletant qui laisse une grande place à l'imaginaire, où tout est suggéré"
Merci Maman.

dimanche 11 janvier 2015

Classement 2014

Bonsoir à tous ! Cette semaine on échappe à la traditionnelle critique. Tout d'abord parce qu'il n'y a pas grand chose de super intéressant au ciné (enfin il y a bien Exodus : Gods and Kings mais je l'ai vu il y'a deux semaines), et surtout parce qu'il fallait bien faire le classement de l'année 2014.

Car oui, ça ne vous aura pas échappé : mais nous sommes en 2015 !
2014 a donc été une année sympathique en terme de cinéma, même si 2013 semblait plus fournie. Pour moi, l'année passée était placée sous le symbole du blockbuster et du grand divertissement, j'essayerais donc de changer la donne avec 2015.
MAIS BREF, on ne va pas attendre plus longtemps : voici les meilleurs films de l'année 2014 selon Bullshit Ent !

11. INTERSTELLAR - Christopher Nolan - États Unis

Véritable bombe cinématographique de l'année 2014, Interstellar aura su déchirer la critique, la toile, et le public. Avec ce long métrage centré sur les voyages spatiaux et la physique quantique, Christopher Nolan rappelle qu'il est un maître incontesté d'Hollywood qui sait repousser le plus possible certaines limites du cinéma.
Le film avance au rythme de Matthew McConaughey qui dévoile son talent d'acteur redoutable et qui mène l'histoire à bien. Le mindfuck final en surprendra plus d'un, et c'est d'ailleurs son scénario qui a hissé Insterstellar à la 11e place de ce classement.
Visuellement époustouflant, Interstellar dépasse largement les meilleurs plans de Gravity qui a l'air étrangement faux et artificiel à côté de lui.
Enfin mention spéciale à TARS qui a le mérite d'être un comic-relief, simple et très efficace.

10. LUCY - Luc Besson - France

Tout le monde se souviendra de Lucy. Le film français qui a tout changé pour le cinéma français. Luc Besson a montré qu'on était tout à fait en mesure de faire du grand spectacle renversant, tout en faisant un film plus philosophique et ambitieux.
La réalisation s'impose comme étant l'apogée du style Besson : un coup c'est du Nikita, un coup c'est du Léon... Bref, du très haut niveau pour ce film, qui peut également se vanter d'une esthétique très singulière et tout autant réussie.
Bien sur, comment ne pas mentionner la performance de Kitty Scarlett dans le rôle titre, la Reine d'Hollywood étale son talent pendant une heure et demie qui passent comme quarante minutes.
Car oui, le film est extrêmement bien rythmé, et on en redemande toujours plus !
Luc Besson signe ici un chef d'oeuvre rarissime (sinon le chef d'oeuvre de sa carrière, on a du mal à croire que c'est lui qui a fait la saga Arthur) bien plus ambitieux qu'il n'y parait au premier abord.

Double lecture obligée pour ce Lucy qui mérite amplement sa 10e place.

9. NOÉ - Darren Aronofsky - États Unis

Si vous suiviez Bullshit Ent en Avril, vous savez bien que j'ai été bluffé tout du long par Noé de Darren Aronofksy.
Le film reprend le mythe biblique du Déluge et de l'Arche de Noé, mais se donne des allures beaucoup plus personnelles, et ne tombe pas dans le cliché basique du film sacro saint sympathique fait pour plaire aux américains puritains.
Non, ici c'est un film noir et ésotérique qui nous est livré. Violent parce que dur, mais fascinant parce qu'unique, Noé amène ce classement à un tout autre niveau. C'est du jamais vu. Et d'ailleurs du tellement jamais vu qu'il a déchiré la critique, puisqu'un grand nombre de gens appelle au massacre de la Bible, ou opte simplement pour dire que le film est juste une belle merde.
Mais ne vous y méprenez pas, Noé est une expérience cinématographique unique, qui respecte la religion comme la science, mais qui se respecte avant tout.
Russell Crowe et Anthony Hopkins sont parfaits dans leurs rôles de patriarches, et puis Emma Watson n'est pas mal non plus !

Darren Aronofksy maintiens son style psychédélique, et emmène Noé à la 9e place.

8. LE VENT SE LÈVE - Hayao Miyazaki - Japon

La mauvaise nouvelle de cette année c'était la révérence de Hayao Miyazaki, le grand maitre du cinéma japonais.
Pour son dernier film, Miyazaki choisit de raconter l'histoire émouvante d'un petit garçon qui rêve de devenir ingénieur en aviation dans le Japon des années 20. Bien différent des autres films du réalisateur, le long métrage ne laisse qu'une petite place à l'onirisme, et préfère rester terre à terre.
Mais le pari est réussi, et le film fait vite venir les larmes. L'animation est toujours aussi exceptionnelle et fluide, d'autant plus qu'elle est couplée à une bande son très réussie et à des effets sonores uniques.
Hayao Miyazaki laisse un grand film derrière lui qui transmet un grand message, et il nous faudra un peu de temps avant qu'un réalisateur ambitieux vienne remplacer le Walt Disney japonais dans nos coeurs.

En attendant Le vent se lève atteint avec brio la 8e place.

7. LIBRE ET ASSOUPI - Mathieu Lamboley - France

Tiens, un film qui ne figure pas sur Bullshit Ent.
Et non, car je n'ai vu Libre et Assoupi que bien après sa sortie. Il n'empêche que le film m'a grandement interpellé car il émane de lui une atmosphère chaleureuse et rassurante. 
Il nous raconte l'histoire de Sébastien (...) qui n'a qu'une ambition dans la vie : ne rien faire. Interprété par Baptiste Lecaplain, le personnage de Sébastien saura plaire à tout le monde tant il est agréable à regarder évoluer. D'ailleurs vous serez vite empreint de sa philosophie après le premier visionnage, et c'est là la force du film : il touche son public.
Aux côté de Baptiste Lecaplain, on retrouve Charlotte Le Bon et Félix Moatti qui jouent également très bien, mais aussi Denis Podalydès qui nous dévoile une autre facette de son talent grâce pourtant à un petit rôle.

Libre et Assoupi est un film particulièrement bienveillant, je le conseille à tous.
Anecdote : je l'ai vu un soir à minuit, le lendemain j'avais cours, une fois terminé je l'ai regardé une nouvelle fois pour être sur que c'était un très bon film.

6. FURY - David Ayer - États Unis

Le game change avec Fury. Véritable renouveau du film de guerre, Fury nous aura tous marqué par sa violence et son honnêteté.
Il apporte une nouvelle vision de la Seconde Guerre Mondiale, celle des pilotes de char. Il est intéressant de noter par ailleurs que Fury respecte scrupuleusement la vérité historique.
Outre ses qualités de bases, Fury est d'une richesse cinématographique notable (scène du duel, tabous brisés...) et David Ayer a pris certains risques sur un projet pourtant considérable.
Les efforts payent largement et Fury devient un film prenant et intense, et surtout passionnant.
Devant la caméra on retrouve Brad Pitt qui reprend sa casquette habituelle de grand héros américain, mais qui pourtant transpire la douleur et la froideur à la perfection. On souligne également la présence d'un Shia Labeouf en forme qui reste à mes yeux un acteur largement sous-estimé.

Fury est sans conteste le nouveau soldat Ryan. Bienvenu à la 6e place.

5. WRONG COPS - Quentin Dupieux - France

Wrong Cops ce n'est pas du cinéma, c'est le contraire, c'est de l'anticinéma.
Ce film n'a rien à voir avec ce que vous avez déjà connu, comme beaucoup des films de Quentin Dupieux. Décrit comme déjanté, il n'en est rien, le film est d'une cohérence absolue, mais est juste à contre courant des codes cinématographiques actuels.
Court mais intense, Wrong Cops déborde d'un humour cru et grinçant qui ne plaira sûrement pas à tout le monde. Visuellement attirant, le film a hérité de l'ambiance propre aux oeuvres de Quentin Dupieux. Ce dernier a laissé son empreinte sur ce film qui pourrait bien être un genre de premier paroxysme du style Dupieux dont les voix sont impénétrables.
Wrong Cops constitue une expérience cinématographique à part entière qui franchit tout simplement les limites du genre.

Rien de surprenant donc à voir Wrong Cops à la 5e place.

4. THE INTERVIEW - Seth Rogen et Evan Goldbergh - États Unis

Le voilà enfin, le film qui a fait trembler Hollywood et le monde !
Je l'ai adoré, le film porte l'héritage de la bande de Judd Appatow et de C'est la Fin, et déborde de ce même humour à la fois fin et potache qui a fait leur succès.
Très bien travaillé tant le sujet l'exigeait, The Interview s'est fait des ennemis dans le monde du cinéma, mais je demeurerai un de ses partisans et verrai dans ce film la promesse d'un renouveau toujours plus qualitatif de la team Appatow et par extension du cinéma américain qui commence à tourner en rond tant les réalisateurs innovants tendent à vieillir.
Beau, bon, et barré, The Interview achèvera de vous convaincre de regarder ses mystérieux Supergrave et Pineapple Express.
James Franco, Seth Rogen, et Randall Park sont toujours aussi bons dans leurs rôles qui innovent ici un petit peu comparé à ce que l'on a pu voir.

Bref, The Interview mérite cette 4e place.

3. LES GARDIENS DE LA GALAXIE - James Gunn - États Unis

Encore un film absent de Bullshit Ent mais qui pourtant m'aura convaincu à 100%.
Excellentissime, Les Gardiens de la Galaxie n'est autre que le dernier Marvel qui marque une pause entre l'epicness des autres films.
Baigné dans un humour grand public très efficace, Les Gardiens de la Galaxie peut compter sur sa gamme de personnage extrêmement variée pour faire rire. Le soin qui leur est apporté est tout à fait louable tant le film est drôle, on rit presque à chaque seconde, bref mission réussie.
Mais ce n'est pas tout ! Le film est également un très bon film de science fiction : l'univers est creusé et travaillé et s'intègre tout à fais l'humour de James Gunn (pourtant inconnu jusqu'ici), et d'ailleurs on assiste à des scènes véritablement impressionnantes, on se demande même ce qu'elles font là bordel. Je pense notamment à la bataille spatiale qui vaut tout ce qui a déjà été fait dans le style.

Le film aura eu le mérite de révéler le classieux Chris Pratt qui figure d'ores et déjà au casting de Jurassic World.
Bref, un film à voir absolument.

2. TEL PÈRE TEL FILS - Hirokazu Koreeda - Japon

Qui l'eut cru, un film japonais dans le top 3.
Mais voilà, il faut bien dire ce qu'il faut dire : Tel père tel fils est un grand chef d'oeuvre. Un huis clos intimiste qui pourtant a le même scénario de base que La vie est un long fleuve tranquille, bordel il fallait le faire.
C'est vraiment dur de vous expliquer en quoi ce film est si parfait tant il y aurai de choses à dire. Réalisation soignée, ingénieuse, et fluide. Casting parfait. Esthétique travaillée. Musique de premier choix. On ne sait plus où donner de la tête avec toutes ses qualités, et plus j'en parle et plus je le vois, plus Tel père tel fils devient bon.
Brièvement drôle et indubitablement sérieux, le film reste tout de même assez dur par moment et même les moins sensibles d'entre vous seront touchés (même moi j'ai eu une larme, c'est dire).

Tel père tel fils est un film qui s'inscrit à perfection dans la tradition du cinéma japonais, et mérite toute votre attention, comme il a mérité celle de Spielberg qui lui a accordé le prix du jury du festival de Cannes.
Je lui décerne le label "Grand Film".

1. THE GRAND BUDAPEST HOTEL - Wes Anderson - États Unis

Le voilà, le film de l'année 2014.
The Grand Budapest Hotel c'est une sorte d'apothéose cinématographique. C'était un peu le film qu'on attendait tous depuis longtemps et qui, ça y est, arrive sur un beau plateau d'argent.
Forgé dans le style Andersonien, géométrique, millimétré, onirique, The Grand Budapest Hotel se laisse regarder encore et encore, tant il est attendrissant et bienveillant.
Un film intelligent et fin, qui sait rester drôle sur la durée grâce à des ressorts scénaristiques très intéressants. Et que dire de ce casting rocambolesque, ou de cette triple mise en abime, ou même de cette façon de changer la caméra selon les époques ? Et comment ne pas mentionner les décors prenants et amusants ?
Sans conteste le plus grand film de Wes Anderson, mais aussi le plus grand film de l'année 2014, The Grand Budapest Hotel n'a qu'un seul défaut : Léa Seydoux et son petit rôle médiocrissime.
Les mots manquent pour décrire ce long métrage qui parle aux adultes avec un langage d'enfant.

Bref 2014/20, le film de l'année.


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Voilà, ce classement touche bel et bien à sa fin, j'espère qu'il vous aura plu. Et je vous dis à la semaine prochaine pour une critique régulière !


dimanche 4 janvier 2015

The Riot Club - Lone Scherfig

Bonjour tout le monde, et par la même occasion, bonne année 2015.
Effectivement, vous l'avez sans doute remarqué, mais 2014 s'est achevé il y a quatre jours et nous revoilà tous repartis pour une nouvelle année qui sera, je l'espère, chargée cinématographiquement.

Pour bien démarrer cette année 2015 on se retrouve avec un film britannique qui n'a fait étrangement pas trop parler de lui dernièrement : The Riot Club de Lone Scherfig.

MISE AU POINT

J'avoue être allé voir The Riot Club un peu au hasard, juste parce que j'avais déjà vu Le Hobbit, Exodus, La French, et Interstellar. Du coup je ne savais quasiment rien sur le film, j'avais juste vaguement vu une bande-annonce rapidement. Bref en cherchant après coup j'ai donc appris que Line Sherfig était la réalisatrice de ce long métrage, et surtout que c'était une inconnue, du moins à l'échelle française. Elle a réalisé une dizaine de films, mais les sorties sont très irrégulières (on passe de deux par ans, à un tout les huit ans).
Pour ce qui est du casting, on a déjà à faire à des têtes plus connues : on retrouve Sam Claflin (Finnick de Hunger Games), Douglas Booth qu'on avait croisé dans Noé, et Natalie Dormer, la sulfureuse Lady Margaery de Game of Thrones. Le reste du casting est composé d'un panel de jeunes mâles dans la fleur de l'âge mais qui se sont cantonnés à des rôles secondaires dans des comédies anglaises que vous ne soupçonnez même pas.

Les bandes annonces nous vendaient des fêtes, de l'or, et de la débauche, mais l'équipe technique reste majoritairement inconnue : rien d'effrayant pour le cinéma anglais que je décris volontairement comme du cinéma français en plus hardcore.
"Challenge accepted".

 DÉVELOPPEMENT

Je suis un peu surpris, mais j'ai vraiment aimé The Riot Club.
J'ai passé un excellent moment en le regardant, je me suis très rarement ennuyé, bref l'expérience du film était agréable, et déjà ça veut tout dire.

Pour comprendre l'intérêt de The Riot Club il faut déjà revenir sur son scénario :
On nous raconte l'histoire de dix jeunes d'Oxford qui constituent une fraternité élitiste secrète au sein de la fac : Le "Riot Club". Le club existe depuis des siècles et a pour vocation de faire vivre des expériences de débauche inoubliable à ses membres en attendant l'arrivée dans la vie professionnelle.
Le film s'attarde sur le parcours de deux nouveaux élèves : Alistair Ryle (Sam Claflin) et Miles Richards (Max Irons) qui sont sollicités pour faire leur entrée dans ce Club très sélect.

Alors oui, le scénario n'est pas très original en lui-même, et on sent un arrière-goût de déjà vu : même The Social Network parlait de ce genre de sujet, et encore c'était une histoire ultra secondaire au sein du film.
Mais se serait une erreur de voir The Riot Club comme un film d'adolescentes, ou un énième Projet X. Déjà parce que ça n'a pas l'air de coller du tout à la filmo et au style de Lone Sherfig, et surtout parce que le film se prend très au sérieux et déborde d'un côté à la fois "trash " mais aussi "classy", là où les party movies se contente du côté trash.
Et surtout : The Riot Club s'offre le luxe d'un vrai développement du scénario et pas seulement d'un enchainement de vannes drôles mais répétitives (oui c'est à toi que je pense Projet X, et pourtant je t'aime bien tu sais…).
Je garde ça pour la fin, parce qu'il y a matière à dire.

Au niveau de la réalisation, Lone Scherfig a un style très personnel. J'ai rarement vu quelque chose de semblable au cours des dernières années. Le film joue en fait énormément sur la lumière et les filtres pour faire varier l'ambiance (c'est presqu'un film d'ambiance en fait).
Quand on est à Oxford, les couleurs sont chaudes et rassurantes, on rigole bien, bonne ambiance, etc. Mais très vite, le fait de sortir de l'université s'accompagne d'un changement drastique de décor et d'éclairage plus froid et austère qui tend à rappeler que les dix protagonistes ne sont des rois qu'au sein de leur établissement.
Protagonistes au développement intéressant puisqu'ils font tous leur apparition progressivement, et même si certains sont plus importants que d'autres, aucun ne semble plus ridicule ou moins utile qu'un autre. Ils suivent tous cependant le même schéma : le fils à papa/le riche héritier membre de la jet-set d'Oxford, qui est venu ici pour s'éclater à n'importe quel prix. 
Au sein même de ce groupe, certains personnages semblent enveloppés d'une aura unique : bien sur l'opposition entre Alistair et Miles, qui représentent chacun des aspect différents du Riot Club, l'un est cynique, violent, avide de reconnaissance, là où l'autre est chaleureux, intègre, bon vivant, et respectueux ; mais on peut aussi penser au Président du Club, blondinet froid aux allures royales qui donne un certain ton au film (#débauche #fric #pédanterie #toujours plus) et qui pourrait être une version plus stylée de Drago Malefoy, ou bien le beau gosse absolu qui a dû capter l'attention du public féminin et qui rappelle le côté jeunesse dorée.
Si je m'attarde tant sur les personnages, c'est bien parce qu'ils sont au centre de l'oeuvre, c'est d'ailleurs une des seules critiques que j'imposerai au film : on finit rapidement par s'intéresser plus aux personnages, qu'aux propos du film en eux-mêmes.

Ces personnages si intéressants, sont interprétés par une bande d'acteurs relativement fournie, où les charismes s'opposent et se complètent, et où finalement tout le monde trouve sa place et son rôle à jouer (#jeudemot). Au final même ce sont les rôles secondaires qui sont en réserve en comparaison à ce collectif de jeunes acteurs masculins : Holliday Grainer (jouant la copine de Miles) reste fade comme il faut, elle est même dans une certaine forme de sous-jeu alors qu'elle a tout de même une ou deux scènes particulièrement intenses, et même Natalie Dormer semble être juste venue pour montrer sa jolie frimousse.
Rien à redire sur le jeu des autres personnages sinon, j'approuve.

Bref, j'avais parlé du scénario un peu plus haut et de son intérêt, et bien le voilà.
[Attention, ceci est une alerte spoiler, si vous ne voulez pas gâcher votre expérience de film, arrêtez vous là]
Le film a donc été vendu comme un de ses bon vieux films de fête pour les jeunes, ces mêmes jeunes qui ne rêvent que d'être riche et de voir leur vie devenir une longue fête interminable. Et bien à mon avis, c'était un piège depuis le début.
Le film est rythmé en deux parties globalement égales (on va pas chipoter) : une première partie où tout les personnages font leur apparition, on découvre les enjeux du scénario, et où prennent place un certain nombre de gags et de situations décalées qui font sincèrement rire, et une autre partie sous la forme d'un long repas où le film prend un tournant complètement différent.
Et c'est là qu'est le piège : la bande annonce ne vend en fait que la première partie, qui correspond effectivement à l'idée que l'on peut se faire d'un film qui parle de jeunes et de fêtes. En fait, le film aurait pu s'arrêter à la fin de la première partie, on aurait pas été surpris et on se serait juste dit "c'était un peu cours quand même".
Et puis arrive cette deuxième partie où tout dégénère pour les jeunes hommes : le Riot Club nouvellement constitué se rassemble dans un restaurant gastronomique de campagne dans le but d'élire leur nouveau président, puisque l'actuel titulaire quitte la fac à la fin de l'année. Mais rapidement le repas atteint des sommets de débauche exceptionnels : toujours plus de plats, d'alcools, le Club devient sévèrement désagréable avec le personnel et se prend pour des petits princes, la drogue commence à circuler, une prostituée intervient, les garçons deviennent fous et commencent à ravager la pièce, la rivalité Alistair/Miles atteint son paroxysme quand la copine de Miles arrive au restaurant par erreur (Alistair l'a en fait sollicité) et que le Club lui propose de remplacer la prostituée… et puis finalement l'apothéose intervient lorsque le gérant du restaurant essaye de les faire partir, et que les garçons choisissent de lui éclater sévèrement la gueule sous l'impulsion d'Alistair. Le gérant s'en sort de justesse (mais gravement blessé) parce que Miles appelle une ambulance. La police arrête ensuite les membres du Club et Alistair est jugé comme responsable.
THE END.

Un coup dur : le film passe en une minute à quelque chose de violent et parfois même dérangeant alors que jusque là on s'amusait bien tranquillement.
Comme je l'ai déjà dit : c'est là l'intérêt du film, en vérité Lone Scherfig diffuse ici un avertissement et montre les effets dévastateurs d'une trop grande débauche, le cercle vicieux de la violence qui transforme les héritiers des meilleurs familles du Royaume Uni en bêtes sauvages assoiffées de sexe, d'alcool, et même de sang.
Le film est peut-être même un réquisitoire contre l'aristocratie britannique débauchée qui pisse sur le peuple depuis plusieurs siècles et qui peut tout s'autoriser sans en craindre les conséquences. 
Les dernières images sont réservées à Miles qui refuse de rester dans le Riot Club, et qui choisit la voie de la rédemption là où ses anciens camarades préfèrent prendre le risque de recroquer dans la Pomme et de rouvrir la boite de Pandore. 

The Riot Club est bien plus qu'un simple film de genre qui voudrait juste vous faire passer un bon moment, et derrière ses aspects banals, il véhicule un vrai message et c'est difficile d'y rester insensible tant Lone Scherfig insiste sur les aspects noirs de l'histoire.
The Riot Club n'est pas sans rappeler un certain film français que j'aime beaucoup : La Crème de la crème de Kim Chapiron où des étudiants d'HEC fondent un réseau de prostitution au sein de leur école et finissent par en payer les lourdes conséquences. Je recommande également.

CONCLUSION 

The Riot Club est un bon film, baigné dans un humour très très efficace (je pense notamment à la scène d'ouverture qui explique la fondation du Club), et qui n'hésite pas à imposer son message au spectateur.
Beau et soigné, c'est un film agréable à regarder ; même si certains rôles secondaires font tache dans le décor et que les personnages principaux deviennent rapidement plus importants que l'histoire elle-même.
Un petit mot pour la musique également qui ne restera pas dans les mémoires, ce qui est un peu regrettable.

Bref, je recommande fortement, ciao tout le monde et bonne année encore.

LE MOT DE LA FIN

Cette semaine et pour bien commencer l'année, le mot de la fin revient à Islay qui nous vient d'Écosse et qui nous dit en VO :
"I thought the movie was quite good and interesting. We could see what a student life was to a certain extent in this kind of university which is excessive parties but also hard working for some students in order to pay their students loan and to keep up with each others. However the main theme, the riot club, wasn't what I expected. The movie only showed one diner that indeed went completely wrong but I thought they would have showed various "experiments" of this club throughout the whole year. All in all it was a good movie but it could have been an amazing one if they used the riot club in a different way."

Thank you Islay, et à la prochaine tout le monde.