Bullshit Ent

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mardi 17 février 2015

Cinquante Nuances de Grey - Sam Taylor Johnson

Bonjour tout le monde, comment allez vous ?
J'espère que vous passez de bonnes vacances, mieux que les miennes en tout cas : forcé de rester enfermé pour réviser.

Anyway, ça faisait un petit moment que je n'étais pas passé par ici mais rassurez vous, l'attente en valait la peine. Cette semaine au cinéma, deux films se faisaient face : The Imitation Game film historique nominé aux Oscars racontant l'histoire vraie d'Allan Turing, et Cinquante Nuances de Grey film aux attraits romantiques mais surtout sexuels-sadique, adapté du tristement célèbre livre du même non.
L'appel du sexe et de la richesse fut le plus fort, je suis allé voir le surnommé "Fifty Shades".

MISE AU POINT 

L'épopée Fifty Shades commence en Mai 2011 lorsque la britannique publie le livre "Fifty Shades of Grey" (en VO, jeu de mot sur "grey" la couleur gris, et Grey le personnage). Succès immédiat pour le lectorat de base féminin américain (catégorie ménagère quinquagénaire), profond malaise chez les critiques qui se morfondent devant le texte.
Fifty Shades devient rapidement une trilogie, mêlant amour et surtout pratiques sexuelles peu communes (sadomasochisme), ce dernier point lui ayant valu son succès et sa réputation.

Le livre a donc reçu des accueils très mitigés entre le public et les critiques, mais il n'en demeure pas moins un succès planétaire, et qui dit succès planétaire dit aussi "film".
Les studios d'Hollywood s'emparent du projet, ici on a affaire à Focus Features et Michael De Luca Productions, deux boites plutôt compétentes si on regarde leurs filmographies.
Sam Taylor Johnson est désignée comme architecte du projet, c'est à dire qu'on a choisit une jeune femme n'ayant à son actif qu'un seul long-métrage moyen (un biopic sur John Lennon) pour réaliser l'oeuvre cinématographique érotique de l'année, choix discutable en effet.
Pour ce qui est du casting, là aussi il y a une anecdote notable : Charlie Hunman avait été choisit pour le rôle de Mr. Grey mais les fans ont tellement crié au scandale qu'il a démissionné avant le début du tournage et a été remplacé par Jamie Dornan. Le rôle féminin est donné à Dakota Johnson.

Bon autrement dit on part sur des bases très moyennes, mais bon chez Bullshit Ent(c) on ne vend pas la peau de l'ours avant de l'avoir tué, donc pas de jugement trop rapides, soyons objectifs.

DÉVELOPPEMENT 

Bon si vous vous êtes un peu baladés sur Internet ses derniers jours, vous avez sans doute constaté que le film n'a pas plu du tout. Mais alors pas du tout.
Et de manière très surprenante je suis de cet avis. Ce film est fondamentalement mauvais.

Par où commencer ? Tellement de choses à dire....
Fifty Shades n'est pas une "oeuvre" facile à appréhender : il y a des gens qui voulaient de l'amour, et d'autres qui voulaient du sexe. Déjà on a un public divisé, mais admettons qu'une grande majorité de gens voulaient le voir pour enfin assister à un spectacle amoureux et SM, érotique mais un peu violent, un genre de film qui n'oublie pas ses influences tout en cassant les codes un peu effarouché du cinéma classique.
Je dis ça parce que c'est comme ça qu'il a été vendu hein : romance érotique un peu violente en gros.

Le plus gros problème de Cinquante Nuances de Grey c'est que le film ne se respecte pas lui-même sans respecter non plus ses engagements et ses objectifs, en fait c'est un film stagnant. Pour ce qui est de l'histoire d'amour, c'est délicat. J'ai lu/vu un certains nombre de personnes qui essayaient de défendre le film par le biais de la romance qui occupe le scénario, prétendant qu'elle a une certaine portée psychologique en plus d'être originale.
Mais non, je suis désolé mais non. On a ici affaire à une histoire d'amour relativement simpliste, en plus d'être réellement irréaliste (on essaye même pas d'y croire), et relevant plus du fantasme superficiel plutôt que du réel effort créatif (une étudiante lambda et un milliardaire alpha ? sérieusement ?).
Déjà les bases de la structure s'effritent, mais après ? Bon ne me dites pas que vous n'avez pas vu la ressemblance avec un autre film : une jeune ingénue qui tombe éperdument amoureuse d'un mystérieux playboy, mais leurs mondes sont incompatibles et eux-mêmes doutent de la pureté de leurs sentiments ce qui ne facilitent pas non plus la tâche. Ça y est ? Exactement : Twilight, chef d'oeuvre de la médiocrité je rappelle.
Donc non, l'histoire d'amour est tout sauf originale, c'est du vu et revu depuis Romeo et Juliette et Les liaisons dangereuses.
Et je ne m'attarde pas sur la soi-disante portée psychologique hein : il n'y en a pas non plus. La romance suit précisément le schéma de base (on se repousse, on s'aime, on se repousse, on s'aime), le scénario ne décolle pas, et les confrontations sentimentales et conceptuelles ne sont que superficielles et ne servent que la trame scénaristique et non pas un potentiel double message.

Enfin bref, je pourrais critiquer l'histoire d'amour du film encore longtemps mais ça n'aurait que peu d'intérêt, parce qu'arrive l'autre critique du film : le sexe.
Fifty Shades, à défaut d'être une histoire d'amour, se vendait comme étant une mise en lumière novatrice et sensuelle sur l'univers tabou mais influent du sadomasochisme ou du moins de la vie sexuelle débridée.
Autrement dit pour ceux qui ne suivent pas au fond, un film avec du cuir, des fouets, des menottes, et de la violence. Et ne me sortez pas que ce n'est pas vrai, et que le film voulait faire un compromis entre l'amour pur et le SM, je cite Christian Grey lui-même : "Je ne fais pas l'amour, je baise violemment".
Voilà à partir de là, on se dit que forcément ça va y aller et qu'au moins le film est honnête avec lui-même et son public.
Encore une fois déception : effectivement il y a des scènes sexuelles consistantes (20 minutes sur les deux heures, chapeau bas Mlle Taylor Johnson, on est presque sur La Vie d'Adèle), qui oui mettent en scène des fouets et des cravates, mais non, ce n'est pas du sexe violent sadomasochiste.
Là on reste sur un niveau très soft, surtout présent pour émoustiller les jeunes filles. Et on va pas se mentir messieurs : si c'est ce que Mr Grey appelle "baiser violemment", alors on en est tous capables.
Les scènes de """"""sexe violent"""""" restent extrêmement passionnelles (deux trois coups de fouets grand max), et le côté SM s'évanouit vite une fois la première scène avec la cravate.
Si j'était un jeune homme sadomasochiste espérant voir enfin un film connu sur mon univers un peu fétichiste, je serais franchement déçu.
Parce qu'au final, on peut tout à fais remplacer le côté "domination" par n'importe quel autre fantasme et l'histoire marche aussi, fuck le SM. 
En fait j'ai vu plus de sexe SM dans la scène de Zed dans Pulp Fiction que dans tout Fifty Shades. Voilà c'est dit.
Ma dernière critique sur le côté sexuel sera le sur le choix des scènes de nus : il n'y en a pas. Enfin si : on voit clairement qu'ils sont nus, mais on ne voit jamais leur corps entièrement dénudé à l'écran. Pourtant il y a deux-trois plans relativement tendancieux, qui laisse entrevoir pendant une seconde un début de sexe, mais non non non, on préfère ne pas se lancer. Vraiment dommage pour un film où le sexe est censé être au coeur du récit.

Bon donc une histoire d'amour mainstream, et du sexe SM très diminué, une absence de nudité malgré un sujet qui le nécessiterait, je crois bien qu'il faut regarder la vérité en face : derrière ses côtés de film d'un genre nouveau, courageux et aventurier, Cinquante Nuances de Grey est un film tout public sérieusement basique, qui a juste été très bien vendu.
Parce qu'au final, la réalisation est correcte sans être audacieuse (encore une fois il y a un problème ici - et d'ailleurs je ne mentionnerais pas le manque d'originalité par certains moments, la scène du planeur c'est la même que celle dans L'Affaire Thomas Crown putain, on ne plagie pas Thomas Crown enfin), et le jeu des acteurs correspond exactement à ce à quoi on s'attendait ; il n'y a rien d'original dans ce film, mais au lieu d'être banal, il est juste mauvais.

Je vais quand même noter l'énorme effort sur l'esthétique du film qui est très belle, je dois le reconnaitre, et sur les musiques qui, elles, semblent vraiment vouloir rendre toute cette histoire plus intenses.
Et j'applaudis aussi la performance de Max Martini en Taylor : de loin le meilleur acteur et le meilleur rôle du film. 

Et petite parenthèse, je suis très étonné que ce film soit encensé par les critiques féministes qui l'invoquent comme un appel aux femmes à assumer leur sexualité et à outrepasser les codes de la société machistes. Moi j'y vois plutôt un film potentiellement très influent qui met en scène un fantasme simpliste et l'édifie en code : les femmes ne rêvent que de riches milliardaires qui peuvent les dominer mais aussi les aimer sincèrement (paradoxe, quand tu nous tiens).

Enfin bref, j'arrête le développement ici et je souhaite bonne chance à tout les hommes qui sortent avec des filles fans de Fifty Shades et qui vont leur demander de les attacher et des les """"""baiser violemment"""""".

CONCLUSION

Cinquante Nuances de Grey est un film qui ne décolle pas et qui n'arrive pas à cacher ses échecs derrière son voile esthétique pourtant concret. Son succès repose sur le bouche à oreille et sur celui du livre, dont la notoriété est due à un lectorat féminin américain à mon avis très peu critique.
Si vous êtes amateur d'histoire d'amour puissantes, de film novateurs, ou si vous êtes pratiquant sadomasochiste, ce film n'est définitivement pas pour vous. D'ailleurs il n'est véritablement destiné qu'aux fans du livre.
En revanche si vous vous ennuyez pendant ces courtes vacances et que vous voulez vous offrir une belle tranche de comédie, je vous le recommande : je n'ai jamais vu une salle de cinéma parler autant pendant une projection de ma vie.

Bonne journée et bonnes vacances, profitez bien c'est bientôt la fin !

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