Bullshit Ent

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dimanche 30 novembre 2014

Night Call - Dan Gilroy

Bonsoir à tous, nous voilà une fois de plus à la limite des délais.
Et cette fois ci, tandis ce que tout le le monde s'est rué sur Astérix et le Domaine des Dieux, j'ai préféré me tourner vers Night Call, trahissant ainsi le cinéma franco-belge, oui je sais j'ai honte.

MISE AU POINT

Quant le réalisateur est inconnu du grand public, c'est dur de vendre un film. Et en plus si le rôle principal est inconnu aussi, il ne reste plus qu'une seule solution : les producteurs.
Car c'est comme ça que Night Call (Nightcrawler en VO, parce qu'en France on aime bien traduire les titres anglais en anglais) a été vendu : il a été annoncé comme étant produit par les mêmes producteurs que Drive de Refn.
Et c'est vrai, comment ne pas penser à Drive en voyant la bande annonce qui nous laisse entrevoir une Los Angeles de nuit et de sombres affaires criminelles ?
Pour en revenir aux acteurs/réalisateurs : Dan Gilroy est l'homme qui a réalisé le controversé Jason Bourne : l'héritage et Jake Gyllenhaal s'est récemment illustré à l'affiche de Enemy un mois plutôt cette année.
Des producteurs a priori performant, un réalisateur régulier, et un acteur qui monte : voici l'équipe de choc qui vous apporte Night Call.

DÉVELOPPEMENT

Night Call raconte l'histoire de Lou Bloom chômeur étrangement trop chaleureux, prêt à tout pour gagner en reconnaissance sociale. Sa quête acharnée de travail l'amènera finalement à devenir pigiste indépendant : c'est à dire sortir la nuit armé d'une caméra pour filmer les crimes urbains et les vendre au chaines locales avant le JT du matin.
Un scénario très original signé Dan Gilroy. Souvenez vous bien du scénario car c'est là que réside le plus grand avantage du film.

Car Night Call est un très bon film, c'est certain. Présenté comme l'héritier esthétique de Drive, il endosse bel et bien ce rôle. L'aspect visuel du film est réellement similaire à celui de son grand frère, mais arrive pourtant à s'en détacher légèrement en jouant sur des aspects lumineux parfois bien plus sombres que ceux de Michael Refn. Le travail lumineux est effectivement au coeur de la réalisation : l'essentiel des scènes se déroulant de nuit, chaque emplacement géographique a un univers coloré bien unique et plus ou moins chaleureux : les locaux de la chaine de télé sont brillamment éclairé créant une impression de sécurité, les rues de LA sont recouvertes de lumières jaunes ou plus colorées émanant de néons et dévoilant ainsi une ambiance calme mais légèrement angoissante, les scènes les plus violentes sont légèrement plongées dans la pénombre renforçant l'aspect glauque ; pour les scènes de jours, l'appartement de Lou Bloom est d'un gris fade qui laisse le spectateur dans une neutralité dérangeante et froide face à la tanière d'un personnage déjà extrêmement perturbant.
En effet, au coeur de ce film à l'ambiance onirique et à la réalisation audacieuse, se trouve un personnage principal d'ores et déjà d'anthologie. Incarné par un Jake Gyllenhaal au top de sa forme, Lou Bloom est un individu qui se force à être souriant et aimable pour cacher sa profonde psychopathologie. Sadique, violent, calculateur, sans pitié, dépourvu d'émotion, Loo Bloom évolue au milieu d'individus qui vivent la situation à 100% (son associé, l'inspecteur, la directrice de diffusion). Mais malgré ce côté profondément terrifiant, le jeune pigiste n'a qu'un seul objectif plutôt surprenant : la reconnaissance sociale. Et si cela implique de filmer des gens agonisant, ou des immeubles en feu, qu'à cela ne tienne. Le jeu physique et mental de Jake Gyllenhaal n'est pas sans rappeler la performance de Javier Bardem dans No country for old men où il incarnait un tueur semblable à une machine à tuer infatigable. Et puis il a un petit air de Desmond dans Lost qui fait légèrement sourire de temps en temps. Il m'a aussi fait penser dans une moindre mesure à Mathieu Amalric dans L'Amour est un crime parfait (critique disponible sur Bullshit Ent), mais j'avais revu le film récemment donc ce n'est pas trop objectif. Tout ça pour dire que Lou Bloom constitue la pièce maitresse du scénario.
Revenons au scénario donc. Ce film part clairement en croisade contre les médias de bas étages, le breaking news, et la télévision et ses acteurs au sens large. Véritable réquisitoire contre le petit écran, le film ne cache pas son propos : il est clairement répété que les différents personnages mercantilisent la mort et la violence, quitte à enfreindre toutes les limites de la vie privée. Au delà de cette analyse brute, le film attaque également cette société de surconsommation hédoniste qui se gargarise dans la souffrance des autres qui devient un bien mercantile comme les autres. La critique s'adresse également aux pigistes et aux chaines de trashnews intéressés par l'argent qui prolonge ce mode de consommation, véritable jeu du cirque moderne. Une belle pique du cinéma envers la télévision qui semble être sur la voie de la mort lente et douloureuse (j'ai fait mon TPE dessus, je sais un peu de quoi je parle). 

CONCLUSION

Petite pépite de cette fin d'année, Night Call est un film à voir absolument qui présente un réel intérêt technique, scénaristique, et moralisateur. Cynique et profond, le film offre une belle critique des déboires de la télé, mieux que n'importe quel autre grosse production hollywoodienne.
Jake Gyllenhaal s'inscrit sur la liste des acteurs à suivre à tout prix, et Dan Gilroy se rachète après un précédent film plutôt moyen.
Et quand aux fameux producteurs de Drive, ils semblent encore avoir parié sur le bon cheval.

Bonne fin de soirée et à bientôt.

LE MOT DE LA FIN

Ce soir le mot de la fin revient à la talentueuse Alix qui a reconnu avoir "aimé les plans de nuits, la lumière, et les jeux de couleurs" mais également "la dégradation progressive du héros".
Un avis plutôt positif donc, merci Alix.

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